toute autre science. Personne ne sauroit l'établir par une étude isolée et en
quelque sorte faite dans l'ombre. Non-seulement les observations qui la
concernent doivent être constatées, mais il est nécessaire de les multiplier sur
un si grand nombre de points très-différens, qu'un seul observateur ne sauroit
assurément rien conclure de ce qu'il pourroit en apprendre par lui-même. Il n'a
donc d'autre voie que d'étudier, pour ainsi dire, publiquement, afin d'exciter
l'attention des autres à la même étude, et par conséquent à l'observation des
faits qui s'y rapportent.
Cependant, celui qui ose entreprendre hautement une étude nouvelle, mettre en
évidence son utilité, montrer la possibilité de fonder la science qui en est
l'objet, indiquer la voie à suivre pour assurer ses progrès, enfin, faire
connoître les torts qu'on a eus de ne point s'en occuper, doit, pour peu qu'il
connoisse les penchans que l'homme tient de la nature, s'attendre à rencontrer
des entraves de tout genre, à part des difficultés qui naissent de l'étude même.
En effet, à l'égard des entreprises ou des idées nouvelles, on sait assez que,
de tout temps, les hommes à prétentions, surtout s'ils sont en position de
dominer, ne reconnoissent de bien et de bon que ce qu'ils ont fait, et
s'opposent, tant qu'ils le peuvent, à ce que l'on fasse ce qu'ils n'ont pas su
faire.
Notre auteur, en essayant d'étudier la météorologie, en quelque sorte sous les
yeux du public, déterminant et circonscrivant son objet, s'attendoit à quantité
d'objections que ses méprises, ses erreurs, peut-être même ce qu'il posoit en
principe, pourroient mériter ; il ne voyoit là que l'ordre naturel des choses,
qu'un bien pour la science à établir. Il supposoit bien encore quelque part à la
malveillance ; mais il se flattoit que l'intérêt évident de la chose, que sa
constance et son attention à suivre la marche connue des études physiques, l'en
feroient triompher. A cet égard, les élémens de ses calculs furent insuffisans :
voici, au contraire, ce qui arriva.
Dès que le premier et même le deuxième numéro de l'Annuaire météorologique
eurent paru, on fut étonné de la nature du projet que cet ouvrage annonçoit ;
mais, à Paris, on affecta bientôt de le considérer comme une entreprise vaine,
présomptueuse, sans possibilité et sans moyens réels d'exécution. Le ridicule
fut adroitement versé de toutes parts sur cette nouvelle production ; l'Annuaire
météorologique reçut partout le nom d'almanach, et les probabilités celui de
prédictions ; en un mot, on employa toutes sortes de moyens pour décourager
l'auteur ; mais, entraîné par son caractère à se mettre toujours au-dessus de
toute opinion que la raison lui montre sans fondement, celui-ci persista dans
son entre- [entreprise]
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